Les sentinelles
Le réel s’enracine souvent dans l’imaginaire, comme si une part de notre monde naissait de l’intangible. Cependant, pour que ce transfert puisse être possible, pour que le rêve devienne réalité, encore faut-il y croire et que les convictions soient à la mesure de leurs moyens. Ce constat rejoint toutes les sphères de l’activité humaine, mais il est d’autant plus apparent en éducation. En effet, en milieu scolaire, l’enseignement s’effectue de manière générale à un niveau virtuel, la créativité y est stimulée et les jeunes, qui ont une propension à s’évader et à côtoyer le rêve, ont souvent l’opportunité de s’adonner à leurs élans créatifs à travers leurs divers projets éducatifs. Après avoir effectué nombre d’observations et d’expérimentations sur l’acte pédagogique, suite à la récolte de nombreux commentaires proférés par une multitude de professionnels engagés en éducation, il apparaît que la condition sine qua non à l’édification d’un projet éducatif destiné à l’individu engagé dans un processus d’apprentissage semble se présenter sous la forme d’un tissage inextricable entre l’humour, le jeu, l’imaginaire et le mystère. D’une certaine manière, on pourrait parler d'une superposition dynamique de ces concepts, telle un palimpseste, qui laisse entrevoir d’une part et d’autre des bribes de l’acabit de ses composantes. Le recours à ce stratagème conduit souvent à des avenues insoupçonnées et devient alors un agent de foisonnement d’idées. Il va sans dire que cette démarche requiert une ouverture d’esprit de la part de celui ou celle qui l’enclenche, car elle nécessite l’exploitation de la diversité comme vecteur de lancement.
Le patrimoine culturel constitue la mémoire collective d’une société et il est nécessaire d’ériger des remparts afin de le protéger contre les assauts de l’ignorance et de l’indifférence. La librairie Le Grimoire et son comité culturel représentent ces nouvelles sentinelles dont la mission est de veiller à l’accès à la culture. Ce nouveau bastion culturel pourrait même être une nouvelle assise sur laquelle pourront prendre leurs envolées nombre d’idées. Cette initiative rejoint une myriade de visées pédagogiques promulguées par le ministère de l’Éducation des Sports et des Loisirs. Elle devient non seulement garante d’une certaine cohésion sociale, mais elle constitue désormais, et cela est tout à fait irréfutable, un moyen de contrer la déficience culturelle.
La portée de cette entreprise est quelque peu déconcertante lorsqu’il s’agit d’en évaluer les impacts à travers l’acte éducatif et sur le plan des répercussions sociales ou individuelles. De ce fait, il apparaît essentiel de procéder de façon systématique pour étayer et exposer de façon exhaustive un projet éducatif de cette envergure. Tout d’abord, une description détaillée de celui-ci permettrait de lever le voile sur son mode de fonctionnement ainsi que sur les variables qui composent son équation. Par la suite, l’analyse qualitative pourrait se porter principalement sur la mise en évidence des moyens à caractère éducationnel facilitant l’accès à la culture. Cette démarche édifiante permet, jusqu’à un certain point, la croissance personnelle de l’individu et le conduit indubitablement vers la socialisation; du moins, il en est ainsi pour celui ou celle dont l’identité sociale est en éveil. L’adolescent ou l’enfant qui s’y engage pourra compter sur un outillage utile pour son cheminement expérientiel ultérieur et, même si cela ne déterminera en rien son devenir, car nul n’est garant de l’avenir et que chacun devient évidemment le fruit de ses batailles, les acquis qu’il aura ainsi obtenus suite à cet engagement seront peut-être des références appréciables.
La librairie Le Grimoire se présente comme un mignon petit anachronisme, elle est une brèche dans le temps qui laisse entrer à notre époque des mythes fabuleux qui enflamment l’imaginaire des jeunes. Avec ses murs de pierre, ses gargouilles et ses boiseries, ce lieu est un clin d’œil au Moyen Âge, cette période obscure, méconnue et mystérieuse de notre histoire qui a généré tant de mythes et de légendes.
Cette petite entreprise est entièrement administrée par un comité culturel de douze élèves. Ceux-ci sont mandatés de cataloguer les livres et les films reçus, de les étiqueter, de les classer par genres et d’en faire la promotion auprès du public. De plus, les élèves sont responsables de la vente de documents ainsi que de la prise en charge du logiciel de gestion de base de données de la librairie
( Bookpedia ). Ils assistent aussi le client lors de ses recherches, ils le conseillent afin qu’il puisse faire des choix judicieux et éclairés. De surcroît, les élèves de ce comité s’adonnent à différentes tâches qui mettent à profit leur créativité. Ils réalisent entre autres des cartes d’affaires, des affiches publicitaires, des signets, etc. Ils ont également créé un site Internet très complet qui présente de long et en large les diverses facettes de la librairie Le Grimoire (librairielegrimoire.weebly.com). Il est important de spécifier que ce site a pour objectifs de faire connaître la librairie de l’école et de fournir un lieu culturel où tous les esprits peuvent s’y complaire et s’y mêler; ces deux objectifs constituent la pierre angulaire de cet espace virtuel. Il va sans dire que cette intention puise essentiellement son énergie dans la générosité des gens; les livres ainsi obtenus sont remis en circulation et offerts à d’autres élèves et aux citoyens à un prix modique. De ce fait, la stagnation inutile des livres sur les étagères est enrayée et la mise en profit par leur disponibilité pour un public éventuel en est assurée. Il est important de souligner que les documents élagués appartenant à la bibliothèque de la polyvalente sont remis en circulation par le biais de cette librairie. Cette façon originale de procéder permet d’offrir à la population, bien que la forme des livres élagués soit parfois quelque peu désuète, des oeuvres intéressantes dont le contenu est tout de même à jour. Malgré le fait que l’inventaire fasse état d’une quantité pléthorique de documents (de tous genres), des activités d’approvisionnement sont planifiées périodiquement. En l’occurrence, des cueillettes de livres sont organisées en fin de semaines et des activités de sollicitation publicitaire sont élaborées et inscrites autant sur le site Internet que dans le journal local (Le Havre). Ces pratiques permettent d’assurer une constance dans le fonctionnement de l’entreprise. Il est clair que la publicité n’a pas à être très agressive puisque tout est à vendre à moins de 5,00 $ l’unité, même les nouveautés en excellente condition. L’analyste digne de ce nom avec son regard lucide ne peut qu’en venir à la conclusion que la plus noble des vertus de ce projet, bien qu’elles soient nombreuses, réside certainement dans le fait que tous les fonds amassés servent à financer des activités culturelles destinées aux jeunes.
Hormis la véhémence des jeunes qui s’affiche à travers les diverses tâches qu’ils accomplissent pour l’efflorescence de cette entreprise, le fait d’assister aux recherches auxquelles s’adonnent les clients en librairie est un petit spectacle touchant; ils sont souvent en quête d’un livre qu’ils ont perdu, d’un thème qui leur tient à cœur ou encore d’un livre rare. Ils ont les yeux écarquillés comme ceux des enfants dans un magasin de jouets et, farfouillant ici et là à l’affût d’une sagesse qui se cache quelque part, il arrive souvent qu’ils la trouvent inopinément.
Les objectifs principaux de ce projet sont multiples et sont centrés essentiellement sur l’effort pour endiguer la tendance pernicieuse actuelle qui conduit à la déficience culturelle. De ce fait, en favorisant l’accès à la culture et en incitant les jeunes à lire, les facteurs responsables de l’émergence d’une classe analphabète s’en retrouvent amoindris. La facette lucrative liée à ce projet ne sert qu’à réinvestir dans l’effort pour atteindre ces objectifs. La région de la MRC du Rocher-Percé est, selon l’échelle dévoilant de façon hiérarchique les secteurs régionaux les plus défavorisés, l’une de celles dont la situation est la plus précaire (indice # 10). Attendre du secours des instances gouvernementales est une option trop passive compte tenu des besoins criants de la population de la région en matière de culture. Il faut que chacun fasse sa part en offrant le bagage culturel qu’il possède. Cette initiative permet de faciliter l’accès aux livres qui, normalement, seraient hors de portée pour beaucoup de familles. En effet, les marasmes économiques que vivent certaines d’entre elles sont suffisants pour en dissuader les membres d’acheter des livres neufs à des prix souvent exorbitants. Alors, parce que la politique de vente en vigueur à la librairie Le Grimoire est plutôt conciliante, parce que les prix y sont modiques et que les échanges sans transactions monétaires sont autorisés, la situation n’est plus la même; il est permis de croire que la tendance malsaine soit renversée et que ce projet fera toute la différence. Il est important de mentionner que le prix demandé pour chaque livre est un prix suggéré et que le client donne ce qu’il veut. Cependant, les gens comprennent bien la raison d’être de cette entreprise et sont toujours très heureux de s’acquitter du prix qui leur est proposé pour le livre sur lequel ils ont jeté leur dévolu. La politique de fixation des prix en vigueur est basée sur trois variables : la date d’édition du document, son état physique et sa valeur à neuf (voir annexe). Il ne faut également pas perdre de vue que cette librairie est alimentée par un site Internet culturel; sous divers onglets, figurent des essais, des textes littéraires, des citations célèbres, des œuvres figurales artistiques (sculptures, peintures) et beaucoup d’autres informations .
Bien que Le Grimoire soit un des porte-étendards de la culture dans la région de la MRC du Rocher-Percé, c’est surtout aux jeunes qu’elle profite. Plusieurs d’entre eux peuvent désormais se procurer des documents qui leur font défaut : pour 0,25 $, ils peuvent obtenir un dictionnaire, cet ouvrage de référence qui, faute de moyens, ils n’ont jamais pu se procurer auparavant; d’autres achètent pour une bouchée de pain des encyclopédies pour réaliser leurs travaux scolaires et, tous les jours, des élèves et des gens de la communauté font de belles trouvailles et jubilent en retrouvant des œuvres qu’ils cherchaient depuis longtemps. Les exemples de bienfaisance liés à ce projet abondent et ne cessent de se multiplier. Il s’agit là de la concrétisation d’une part du patrimoine culturel, un moyen tangible d’offrir le plus beau cadeau qui soit : l’accès à la connaissance et, par ce fait même, une ouverture sur le monde.
Il est indéniable que l’élève accède à un champ expérientiel édifiant en s’intégrant au comité culturel en charge de la mise en place des linéaments de cette entreprise scolaire. Bien que, pour la plupart des élèves, l’initiation aux technologies d’information et de communication soit d’ores et déjà accomplie, il n’en demeure pas moins que la réalisation des tâches liées aux divers mandats qui leur sont proposés les amène à affiner leurs compétences en ce domaine. Effectivement, par le catalogage informatique des différents ouvrages de la librairie par le biais d’un logiciel de gestion de base de données, par le recours à différents types de programmes informatiques pour l’élaboration de certaines tâches, les élèves développent certains automatismes qui pourraient paraître pour d’autres comme une preuve flagrante d’expertise. Le recours à ces compétences est on ne peut plus utile, autant en ce qui concerne la promotion et la gestion que sur le plan de la production d’éléments décoratifs. Il est à noter que le site Internet à caractère culturel est pris en charge et est alimenté en grande partie par les élèves de ce comité. Certains jeunes ont été ciblés et investis du devoir d’apposer un soutien visuel sur ce site Internet ainsi que sur des affiches publicitaires; ils apprennent ainsi les rudiments de la photographie et quelques principes reliés au domaine de la production de matériel promotionnel. En somme, la technologie de pointe est abondamment exploitée et est un atout de taille pour cette entreprise culturelle.
L’estime de soi de l’individu est définitivement tributaire de ses réussites personnelles. En s’engageant au sein du comité culturel de la librairie et en s’acquittant des tâches diverses qui leur sont assignées, les élèves développent une fierté et ont réellement le sentiment d’être utiles, car les desseins de leur travail sont concrets et tangibles. Par la force des choses, ceux-ci développent des relations amicales avec d’autres élèves, car ils établissent régulièrement des plans d’actions représentatifs des intérêts de l’organisme auquel ils font partie. Ainsi, ils en viennent inévitablement à s’engager dans des interactions sociales basées sur la collaboration et la coopération; n’est-ce pas là en partie ce que l’on veut signifier lorsqu’il est question du développement de la conscience citoyenne? Conjointement, ils assurent la bonne gestion de l’entreprise, ils en assurent la comptabilité, ils gèrent les horaires de travail en procédant à des répartitions équitables de tâches, etc. À un autre niveau, sur le plan individuel, il arrive souvent qu’un élève soit affecté à une tâche précise; cette marque de confiance le rend habituellement fier et il n’est pas rare de constater qu’il s’acquitte de la besogne qui lui est échue avec zèle. En le responsabilisant de la sorte, il s’engage allègrement et sans le savoir sur la voie conduisant à l’autonomie.
La mise sur pied de cette unité culturel éducative permet également de mettre en place un système de renforcement positif destiné aux élèves ayant certaines carences motivationnelles dans leur parcours scolaires. Afin d’encourager ces jeunes lorsqu’ils répondent aux attentes de leurs enseignants, des chèques-privilèges symboliques leur sont attribués et ceux-ci peuvent alors s’en servir pour acheter des livres au Grimoire. Les élèves du premier cycle adapté (PCA), ceux qui évoluent au sein des groupes engagés dans la formation des métiers semi-spécialisés (FMS) ainsi que ceux évoluant dans les groupes axés sur la formation préparatoire au travail (FPT) ne sont pas en reste. Ils ont pour mandat de réparer les documents de la librairie et de la bibliothèque, de créer des livres secrets (des livres dans lesquels on peut cacher un objet quelconque) et, de plus, ils ont la possibilité de s’adonner à leurs élans créatifs en confectionnant des sacs, des signets et des affiches à l’effigie du Grimoire.
En ayant recours aux idées behavioristes ou dans une optique purement symboliste, peu importe, il est permis d’affirmer que les lieux où évoluent l’individu sont représentatifs de son état mental et affectif. C’est pourquoi, cette librairie est un lieu propre et bien rangé. Les élèves du comité culturel qui s’en occupent entretiennent des rapports amicaux et harmonieux entre eux et se sentent à la fois chez eux et ailleurs… Ils sont très attachés à ce lieu; au cours de l’année, un sentiment d’appartenance envers la librairie Le Grimoire s’est développé; ce lieu est devenu une sorte de refuge culturel où chacun y trouve son compte. Ils doivent non seulement s’assurer que la librairie demeure propre, que les livres soient bien rangés selon un code préétabli (classification par genres littéraires), mais il leur incombe aussi de faire respecter les règles concernant la salubrité des lieux.
Qui n’a pas joué un jour, étant enfant, à être un commerçant? Les élèves de cette entité culturelle peuvent ainsi réaliser un petit rêve d’enfance en s’occupant d’un commerce. Il va sans dire que ce projet fait vibrer les cordes entrepreneuriales en chacun et que l’idée de contribuer à la réussite et à l’épanouissement de ce projet est d’autant plus grisante.
Les compétences susceptibles d’être développées ou affinées dans le cadre de cette démarche éducative ne sont pas que d’ordre organisationnel, cognitif ou social, elles sont aussi et, pour une bonne part, d’ordre langagier. En effet, les élèves siégeant au comité culturel doivent régulièrement écrire des articles ou d’autres types de textes sur le site Internet de la librairie, ils sont appelés à réaliser des affiches publicitaires, des signets, des cartes d’affaires, ils doivent communiquer avec les médias, rédiger des courts messages pour le radio - journal de l’école et ces tâches scripturales étayées, corrigées et révisées ne composent en soi que la trame de fond d’œuvres complexes et détaillées ou une simple esquisse de grands projets à venir.
Étant des lecteurs assidus et avertis, les membres de cet organisme culturel sont pleinement aptes à conseiller les clients de manière adéquate. Parfois même, la nécessité étant la mère de toutes les inventions et l’instigatrice de la débrouillardise, ils doivent s’exprimer en anglais. En effet, l’une des vocations de cette entreprise est de rejoindre la communauté dans toute sa diversité. C’est pourquoi, ceux et celles qui y travaillent ont le devoir de s’adresser au public dans les deux langues officielles. Alors, bien qu’elle soit moins imposante que la section francophone, une section anglophone a été aménagée au cœur de la librairie. De ce fait, les membres du comité culturel se doivent de prendre connaissance des œuvres en anglais figurant dans cette section en effectuant des lectures de leur quatrième de couverture.
Dans le même ordre d’idées, il faut souligner l’accueil chaleureux empreint de courtoisie et de bien séance que réservent les jeunes à leurs clients. Cette attitude permet d’instaurer un climat de confiance et d’amener divers échanges fructueux et obligeants à tous les égards.
Le fait que cette entreprise soit en quelque sorte un agent permettant une croissance personnelle implique aussi une incidence sur les processus de socialisation. L’école est une microsociété, une sorte de camp de formation de citoyens, ses instances, ses valeurs et ses principes sont les matrices d’une cohésion sociale efficiente de la société qu’elle prétend imiter. En ce sens, les membres du comité culturel se concertent et n’hésitent pas à consulter parfois le personnel de l’équipe-école afin de prendre les meilleures décisions possibles lorsqu’il est question de satisfaire le plus grand nombre d’individus et de garder le cap sur leurs visées culturelles. En l’occurrence, pour ne citer qu’un seul cas, rien n’a été négligé en ce qui concerne l’approvisionnement en livres et, après un consensus, il a été décidé d’approcher certains organismes communautaires; cette démarche a permis d’obtenir une aide substantielle. Il faut également souligner l’implication des parents; certains d’entre eux ont offert une quantité appréciable de livres. L’engagement des parents dans le parcours scolaire de leur enfant est plus que souhaitable, il est essentiel et s’inscrit de façon prioritaire dans les aspirations éducatives du ministère de l’Éducation, des Sports et des Loisirs. Il est du devoir du membre d’une équipe-école d’encourager cet engagement des parents et d’en assurer la continuité. L’éducation forge l’esprit d’une société, elle permet de dévoiler au monde l’ampleur de sa beauté, mais avant tout, en tant qu’individu, il appartient à chacun de faire sa part et d’offrir aux autres ce qu’il peut donner en matière d’idées ou de culture.
Somme toute, il est permis d’affirmer que ce projet rejoint les visées du ministère de l’Éducation, des Sports et des Loisirs et qu'il répond aux besoins de la population en ce qui concerne l’accès à la culture. Ce projet éducatif conduit non seulement l’individu vers sa socialisation, mais il permet aussi sa croissance personnelle à bien des niveaux. Par son style néogothique attrayant et fascinant, cette librairie, dirigée par des élèves siégeant à un comité culturel dynamique, attire les gens de tous âges. Cette initiative permet de lutter contre l'appauvrissement culturel et favorise l’évolution générale des connaissances. Elle constitue également un instrument permettant aux jeunes d’atteindre et de raffiner certaines compétences langagières en français et en anglais, notamment en lecture, en écriture et à l’oral. La librairie Le Grimoire génère des profits pour financer des projets culturels destinés aux jeunes et peut être aussi considérée comme une instance permettant l’élaboration de stratégies éducatives. Entrer au Grimoire, c’est mettre le pied dans un autre monde, un monde où l’imaginaire pourra pour un temps voiler les retenues ou les aigreurs de la vie… Cette entreprise perdurera certainement; il est à parier qu’elle composera une part du patrimoine culturel de son école et de sa communauté. Peut-être, continuera-t-elle à enflammer la ferveur des jeunes en faisant vibrer toujours plus fort leurs cordes entrepreneuriales.
Dans un futur possible et peut-être lointain, il est crédible d’imaginer des avenues qui pourraient permettre à cette initiative de rejoindre toujours un plus large public. En extrapolant, il est facile d’anticiper la création des jumelles de la librairie Le Grimoire dans d’autres écoles (Le Petit Grimoire pour les écoles primaires), d’admettre la possibilité de mettre sur pied un centre de distribution de livres dont les activités seraient conjointement administrées par les responsables de ce centre, par les écoles et par la commission scolaire. Celui-ci pourrait être éventuellement subventionné et aurait pour but d’alimenter les librairies des écoles en redistribuant les livres élagués des bibliothèques de la commission scolaire. Les responsables de ce centre de distribution pourraient organiser des cueillettes massives de livres dans toute la région. Avec les subventions, cette entité scolaire pourrait également étendre ses activités en dehors de la région afin d’acheter ou de récolter des livres usagés qui s’y trouvent; ces documents pourraient être, par la suite, redistribués aux librairies scolaires situées entre Percé et Matapédia. Toujours dans cet élan inventif, il est aussi permis d’imaginer un service de vente de livres usagés en ligne par le biais de l’Internet et du courrier interne. Tout cela n’est qu’un soupçon des idées qui s’imposent d’elles-mêmes, elles sont la continuité d’un rêve qui s’enracine dans le réel…
Benoît Laplante
Le patrimoine culturel constitue la mémoire collective d’une société et il est nécessaire d’ériger des remparts afin de le protéger contre les assauts de l’ignorance et de l’indifférence. La librairie Le Grimoire et son comité culturel représentent ces nouvelles sentinelles dont la mission est de veiller à l’accès à la culture. Ce nouveau bastion culturel pourrait même être une nouvelle assise sur laquelle pourront prendre leurs envolées nombre d’idées. Cette initiative rejoint une myriade de visées pédagogiques promulguées par le ministère de l’Éducation des Sports et des Loisirs. Elle devient non seulement garante d’une certaine cohésion sociale, mais elle constitue désormais, et cela est tout à fait irréfutable, un moyen de contrer la déficience culturelle.
La portée de cette entreprise est quelque peu déconcertante lorsqu’il s’agit d’en évaluer les impacts à travers l’acte éducatif et sur le plan des répercussions sociales ou individuelles. De ce fait, il apparaît essentiel de procéder de façon systématique pour étayer et exposer de façon exhaustive un projet éducatif de cette envergure. Tout d’abord, une description détaillée de celui-ci permettrait de lever le voile sur son mode de fonctionnement ainsi que sur les variables qui composent son équation. Par la suite, l’analyse qualitative pourrait se porter principalement sur la mise en évidence des moyens à caractère éducationnel facilitant l’accès à la culture. Cette démarche édifiante permet, jusqu’à un certain point, la croissance personnelle de l’individu et le conduit indubitablement vers la socialisation; du moins, il en est ainsi pour celui ou celle dont l’identité sociale est en éveil. L’adolescent ou l’enfant qui s’y engage pourra compter sur un outillage utile pour son cheminement expérientiel ultérieur et, même si cela ne déterminera en rien son devenir, car nul n’est garant de l’avenir et que chacun devient évidemment le fruit de ses batailles, les acquis qu’il aura ainsi obtenus suite à cet engagement seront peut-être des références appréciables.
La librairie Le Grimoire se présente comme un mignon petit anachronisme, elle est une brèche dans le temps qui laisse entrer à notre époque des mythes fabuleux qui enflamment l’imaginaire des jeunes. Avec ses murs de pierre, ses gargouilles et ses boiseries, ce lieu est un clin d’œil au Moyen Âge, cette période obscure, méconnue et mystérieuse de notre histoire qui a généré tant de mythes et de légendes.
Cette petite entreprise est entièrement administrée par un comité culturel de douze élèves. Ceux-ci sont mandatés de cataloguer les livres et les films reçus, de les étiqueter, de les classer par genres et d’en faire la promotion auprès du public. De plus, les élèves sont responsables de la vente de documents ainsi que de la prise en charge du logiciel de gestion de base de données de la librairie
( Bookpedia ). Ils assistent aussi le client lors de ses recherches, ils le conseillent afin qu’il puisse faire des choix judicieux et éclairés. De surcroît, les élèves de ce comité s’adonnent à différentes tâches qui mettent à profit leur créativité. Ils réalisent entre autres des cartes d’affaires, des affiches publicitaires, des signets, etc. Ils ont également créé un site Internet très complet qui présente de long et en large les diverses facettes de la librairie Le Grimoire (librairielegrimoire.weebly.com). Il est important de spécifier que ce site a pour objectifs de faire connaître la librairie de l’école et de fournir un lieu culturel où tous les esprits peuvent s’y complaire et s’y mêler; ces deux objectifs constituent la pierre angulaire de cet espace virtuel. Il va sans dire que cette intention puise essentiellement son énergie dans la générosité des gens; les livres ainsi obtenus sont remis en circulation et offerts à d’autres élèves et aux citoyens à un prix modique. De ce fait, la stagnation inutile des livres sur les étagères est enrayée et la mise en profit par leur disponibilité pour un public éventuel en est assurée. Il est important de souligner que les documents élagués appartenant à la bibliothèque de la polyvalente sont remis en circulation par le biais de cette librairie. Cette façon originale de procéder permet d’offrir à la population, bien que la forme des livres élagués soit parfois quelque peu désuète, des oeuvres intéressantes dont le contenu est tout de même à jour. Malgré le fait que l’inventaire fasse état d’une quantité pléthorique de documents (de tous genres), des activités d’approvisionnement sont planifiées périodiquement. En l’occurrence, des cueillettes de livres sont organisées en fin de semaines et des activités de sollicitation publicitaire sont élaborées et inscrites autant sur le site Internet que dans le journal local (Le Havre). Ces pratiques permettent d’assurer une constance dans le fonctionnement de l’entreprise. Il est clair que la publicité n’a pas à être très agressive puisque tout est à vendre à moins de 5,00 $ l’unité, même les nouveautés en excellente condition. L’analyste digne de ce nom avec son regard lucide ne peut qu’en venir à la conclusion que la plus noble des vertus de ce projet, bien qu’elles soient nombreuses, réside certainement dans le fait que tous les fonds amassés servent à financer des activités culturelles destinées aux jeunes.
Hormis la véhémence des jeunes qui s’affiche à travers les diverses tâches qu’ils accomplissent pour l’efflorescence de cette entreprise, le fait d’assister aux recherches auxquelles s’adonnent les clients en librairie est un petit spectacle touchant; ils sont souvent en quête d’un livre qu’ils ont perdu, d’un thème qui leur tient à cœur ou encore d’un livre rare. Ils ont les yeux écarquillés comme ceux des enfants dans un magasin de jouets et, farfouillant ici et là à l’affût d’une sagesse qui se cache quelque part, il arrive souvent qu’ils la trouvent inopinément.
Les objectifs principaux de ce projet sont multiples et sont centrés essentiellement sur l’effort pour endiguer la tendance pernicieuse actuelle qui conduit à la déficience culturelle. De ce fait, en favorisant l’accès à la culture et en incitant les jeunes à lire, les facteurs responsables de l’émergence d’une classe analphabète s’en retrouvent amoindris. La facette lucrative liée à ce projet ne sert qu’à réinvestir dans l’effort pour atteindre ces objectifs. La région de la MRC du Rocher-Percé est, selon l’échelle dévoilant de façon hiérarchique les secteurs régionaux les plus défavorisés, l’une de celles dont la situation est la plus précaire (indice # 10). Attendre du secours des instances gouvernementales est une option trop passive compte tenu des besoins criants de la population de la région en matière de culture. Il faut que chacun fasse sa part en offrant le bagage culturel qu’il possède. Cette initiative permet de faciliter l’accès aux livres qui, normalement, seraient hors de portée pour beaucoup de familles. En effet, les marasmes économiques que vivent certaines d’entre elles sont suffisants pour en dissuader les membres d’acheter des livres neufs à des prix souvent exorbitants. Alors, parce que la politique de vente en vigueur à la librairie Le Grimoire est plutôt conciliante, parce que les prix y sont modiques et que les échanges sans transactions monétaires sont autorisés, la situation n’est plus la même; il est permis de croire que la tendance malsaine soit renversée et que ce projet fera toute la différence. Il est important de mentionner que le prix demandé pour chaque livre est un prix suggéré et que le client donne ce qu’il veut. Cependant, les gens comprennent bien la raison d’être de cette entreprise et sont toujours très heureux de s’acquitter du prix qui leur est proposé pour le livre sur lequel ils ont jeté leur dévolu. La politique de fixation des prix en vigueur est basée sur trois variables : la date d’édition du document, son état physique et sa valeur à neuf (voir annexe). Il ne faut également pas perdre de vue que cette librairie est alimentée par un site Internet culturel; sous divers onglets, figurent des essais, des textes littéraires, des citations célèbres, des œuvres figurales artistiques (sculptures, peintures) et beaucoup d’autres informations .
Bien que Le Grimoire soit un des porte-étendards de la culture dans la région de la MRC du Rocher-Percé, c’est surtout aux jeunes qu’elle profite. Plusieurs d’entre eux peuvent désormais se procurer des documents qui leur font défaut : pour 0,25 $, ils peuvent obtenir un dictionnaire, cet ouvrage de référence qui, faute de moyens, ils n’ont jamais pu se procurer auparavant; d’autres achètent pour une bouchée de pain des encyclopédies pour réaliser leurs travaux scolaires et, tous les jours, des élèves et des gens de la communauté font de belles trouvailles et jubilent en retrouvant des œuvres qu’ils cherchaient depuis longtemps. Les exemples de bienfaisance liés à ce projet abondent et ne cessent de se multiplier. Il s’agit là de la concrétisation d’une part du patrimoine culturel, un moyen tangible d’offrir le plus beau cadeau qui soit : l’accès à la connaissance et, par ce fait même, une ouverture sur le monde.
Il est indéniable que l’élève accède à un champ expérientiel édifiant en s’intégrant au comité culturel en charge de la mise en place des linéaments de cette entreprise scolaire. Bien que, pour la plupart des élèves, l’initiation aux technologies d’information et de communication soit d’ores et déjà accomplie, il n’en demeure pas moins que la réalisation des tâches liées aux divers mandats qui leur sont proposés les amène à affiner leurs compétences en ce domaine. Effectivement, par le catalogage informatique des différents ouvrages de la librairie par le biais d’un logiciel de gestion de base de données, par le recours à différents types de programmes informatiques pour l’élaboration de certaines tâches, les élèves développent certains automatismes qui pourraient paraître pour d’autres comme une preuve flagrante d’expertise. Le recours à ces compétences est on ne peut plus utile, autant en ce qui concerne la promotion et la gestion que sur le plan de la production d’éléments décoratifs. Il est à noter que le site Internet à caractère culturel est pris en charge et est alimenté en grande partie par les élèves de ce comité. Certains jeunes ont été ciblés et investis du devoir d’apposer un soutien visuel sur ce site Internet ainsi que sur des affiches publicitaires; ils apprennent ainsi les rudiments de la photographie et quelques principes reliés au domaine de la production de matériel promotionnel. En somme, la technologie de pointe est abondamment exploitée et est un atout de taille pour cette entreprise culturelle.
L’estime de soi de l’individu est définitivement tributaire de ses réussites personnelles. En s’engageant au sein du comité culturel de la librairie et en s’acquittant des tâches diverses qui leur sont assignées, les élèves développent une fierté et ont réellement le sentiment d’être utiles, car les desseins de leur travail sont concrets et tangibles. Par la force des choses, ceux-ci développent des relations amicales avec d’autres élèves, car ils établissent régulièrement des plans d’actions représentatifs des intérêts de l’organisme auquel ils font partie. Ainsi, ils en viennent inévitablement à s’engager dans des interactions sociales basées sur la collaboration et la coopération; n’est-ce pas là en partie ce que l’on veut signifier lorsqu’il est question du développement de la conscience citoyenne? Conjointement, ils assurent la bonne gestion de l’entreprise, ils en assurent la comptabilité, ils gèrent les horaires de travail en procédant à des répartitions équitables de tâches, etc. À un autre niveau, sur le plan individuel, il arrive souvent qu’un élève soit affecté à une tâche précise; cette marque de confiance le rend habituellement fier et il n’est pas rare de constater qu’il s’acquitte de la besogne qui lui est échue avec zèle. En le responsabilisant de la sorte, il s’engage allègrement et sans le savoir sur la voie conduisant à l’autonomie.
La mise sur pied de cette unité culturel éducative permet également de mettre en place un système de renforcement positif destiné aux élèves ayant certaines carences motivationnelles dans leur parcours scolaires. Afin d’encourager ces jeunes lorsqu’ils répondent aux attentes de leurs enseignants, des chèques-privilèges symboliques leur sont attribués et ceux-ci peuvent alors s’en servir pour acheter des livres au Grimoire. Les élèves du premier cycle adapté (PCA), ceux qui évoluent au sein des groupes engagés dans la formation des métiers semi-spécialisés (FMS) ainsi que ceux évoluant dans les groupes axés sur la formation préparatoire au travail (FPT) ne sont pas en reste. Ils ont pour mandat de réparer les documents de la librairie et de la bibliothèque, de créer des livres secrets (des livres dans lesquels on peut cacher un objet quelconque) et, de plus, ils ont la possibilité de s’adonner à leurs élans créatifs en confectionnant des sacs, des signets et des affiches à l’effigie du Grimoire.
En ayant recours aux idées behavioristes ou dans une optique purement symboliste, peu importe, il est permis d’affirmer que les lieux où évoluent l’individu sont représentatifs de son état mental et affectif. C’est pourquoi, cette librairie est un lieu propre et bien rangé. Les élèves du comité culturel qui s’en occupent entretiennent des rapports amicaux et harmonieux entre eux et se sentent à la fois chez eux et ailleurs… Ils sont très attachés à ce lieu; au cours de l’année, un sentiment d’appartenance envers la librairie Le Grimoire s’est développé; ce lieu est devenu une sorte de refuge culturel où chacun y trouve son compte. Ils doivent non seulement s’assurer que la librairie demeure propre, que les livres soient bien rangés selon un code préétabli (classification par genres littéraires), mais il leur incombe aussi de faire respecter les règles concernant la salubrité des lieux.
Qui n’a pas joué un jour, étant enfant, à être un commerçant? Les élèves de cette entité culturelle peuvent ainsi réaliser un petit rêve d’enfance en s’occupant d’un commerce. Il va sans dire que ce projet fait vibrer les cordes entrepreneuriales en chacun et que l’idée de contribuer à la réussite et à l’épanouissement de ce projet est d’autant plus grisante.
Les compétences susceptibles d’être développées ou affinées dans le cadre de cette démarche éducative ne sont pas que d’ordre organisationnel, cognitif ou social, elles sont aussi et, pour une bonne part, d’ordre langagier. En effet, les élèves siégeant au comité culturel doivent régulièrement écrire des articles ou d’autres types de textes sur le site Internet de la librairie, ils sont appelés à réaliser des affiches publicitaires, des signets, des cartes d’affaires, ils doivent communiquer avec les médias, rédiger des courts messages pour le radio - journal de l’école et ces tâches scripturales étayées, corrigées et révisées ne composent en soi que la trame de fond d’œuvres complexes et détaillées ou une simple esquisse de grands projets à venir.
Étant des lecteurs assidus et avertis, les membres de cet organisme culturel sont pleinement aptes à conseiller les clients de manière adéquate. Parfois même, la nécessité étant la mère de toutes les inventions et l’instigatrice de la débrouillardise, ils doivent s’exprimer en anglais. En effet, l’une des vocations de cette entreprise est de rejoindre la communauté dans toute sa diversité. C’est pourquoi, ceux et celles qui y travaillent ont le devoir de s’adresser au public dans les deux langues officielles. Alors, bien qu’elle soit moins imposante que la section francophone, une section anglophone a été aménagée au cœur de la librairie. De ce fait, les membres du comité culturel se doivent de prendre connaissance des œuvres en anglais figurant dans cette section en effectuant des lectures de leur quatrième de couverture.
Dans le même ordre d’idées, il faut souligner l’accueil chaleureux empreint de courtoisie et de bien séance que réservent les jeunes à leurs clients. Cette attitude permet d’instaurer un climat de confiance et d’amener divers échanges fructueux et obligeants à tous les égards.
Le fait que cette entreprise soit en quelque sorte un agent permettant une croissance personnelle implique aussi une incidence sur les processus de socialisation. L’école est une microsociété, une sorte de camp de formation de citoyens, ses instances, ses valeurs et ses principes sont les matrices d’une cohésion sociale efficiente de la société qu’elle prétend imiter. En ce sens, les membres du comité culturel se concertent et n’hésitent pas à consulter parfois le personnel de l’équipe-école afin de prendre les meilleures décisions possibles lorsqu’il est question de satisfaire le plus grand nombre d’individus et de garder le cap sur leurs visées culturelles. En l’occurrence, pour ne citer qu’un seul cas, rien n’a été négligé en ce qui concerne l’approvisionnement en livres et, après un consensus, il a été décidé d’approcher certains organismes communautaires; cette démarche a permis d’obtenir une aide substantielle. Il faut également souligner l’implication des parents; certains d’entre eux ont offert une quantité appréciable de livres. L’engagement des parents dans le parcours scolaire de leur enfant est plus que souhaitable, il est essentiel et s’inscrit de façon prioritaire dans les aspirations éducatives du ministère de l’Éducation, des Sports et des Loisirs. Il est du devoir du membre d’une équipe-école d’encourager cet engagement des parents et d’en assurer la continuité. L’éducation forge l’esprit d’une société, elle permet de dévoiler au monde l’ampleur de sa beauté, mais avant tout, en tant qu’individu, il appartient à chacun de faire sa part et d’offrir aux autres ce qu’il peut donner en matière d’idées ou de culture.
Somme toute, il est permis d’affirmer que ce projet rejoint les visées du ministère de l’Éducation, des Sports et des Loisirs et qu'il répond aux besoins de la population en ce qui concerne l’accès à la culture. Ce projet éducatif conduit non seulement l’individu vers sa socialisation, mais il permet aussi sa croissance personnelle à bien des niveaux. Par son style néogothique attrayant et fascinant, cette librairie, dirigée par des élèves siégeant à un comité culturel dynamique, attire les gens de tous âges. Cette initiative permet de lutter contre l'appauvrissement culturel et favorise l’évolution générale des connaissances. Elle constitue également un instrument permettant aux jeunes d’atteindre et de raffiner certaines compétences langagières en français et en anglais, notamment en lecture, en écriture et à l’oral. La librairie Le Grimoire génère des profits pour financer des projets culturels destinés aux jeunes et peut être aussi considérée comme une instance permettant l’élaboration de stratégies éducatives. Entrer au Grimoire, c’est mettre le pied dans un autre monde, un monde où l’imaginaire pourra pour un temps voiler les retenues ou les aigreurs de la vie… Cette entreprise perdurera certainement; il est à parier qu’elle composera une part du patrimoine culturel de son école et de sa communauté. Peut-être, continuera-t-elle à enflammer la ferveur des jeunes en faisant vibrer toujours plus fort leurs cordes entrepreneuriales.
Dans un futur possible et peut-être lointain, il est crédible d’imaginer des avenues qui pourraient permettre à cette initiative de rejoindre toujours un plus large public. En extrapolant, il est facile d’anticiper la création des jumelles de la librairie Le Grimoire dans d’autres écoles (Le Petit Grimoire pour les écoles primaires), d’admettre la possibilité de mettre sur pied un centre de distribution de livres dont les activités seraient conjointement administrées par les responsables de ce centre, par les écoles et par la commission scolaire. Celui-ci pourrait être éventuellement subventionné et aurait pour but d’alimenter les librairies des écoles en redistribuant les livres élagués des bibliothèques de la commission scolaire. Les responsables de ce centre de distribution pourraient organiser des cueillettes massives de livres dans toute la région. Avec les subventions, cette entité scolaire pourrait également étendre ses activités en dehors de la région afin d’acheter ou de récolter des livres usagés qui s’y trouvent; ces documents pourraient être, par la suite, redistribués aux librairies scolaires situées entre Percé et Matapédia. Toujours dans cet élan inventif, il est aussi permis d’imaginer un service de vente de livres usagés en ligne par le biais de l’Internet et du courrier interne. Tout cela n’est qu’un soupçon des idées qui s’imposent d’elles-mêmes, elles sont la continuité d’un rêve qui s’enracine dans le réel…
Benoît Laplante